Je dois commencer par mentionner mon manque d’objectivité sur le sujet suivant puisque j’ai eu la chance de suivre le programme l’été passé.
Le CILLDI (« Canadian Indigineous Languages and Literacy Development », à prononcer “sill-dee” comme l’indique le site web) est l’Institut pour le Développement de la littératie et des langues indigènes canadiennes. Il offre un programme intensif de cours d’été à l’Université de l’Alberta, qui a lieu en général au mois de juillet pendant trois semaines. L’objectif à long terme du programme est de raviver les langues natives du Canada grâce à l’éducation.
Le CILLDI est né en 2000 et a continué à se développer année après année. Il vise à valoriser les peuples des Premières Nations afin qu’ils prennent en main leur propre réveil, leur récolte de documents et la promotion de leurs langues et cultures. Un examen du corps estudiantin montrera qu’il ne s’agit pas d’un programme seulement académique, mais que les organisateurs s’attachent chaque année à rassembler des gens d’horizons différents pour qu’ils acquièrent des connaissances à réutiliser ensuite dans leurs communautés respectives.
Les organisateurs du CILLDI tentent d’atteindre leur objectif de diversité étudiante grâce à des bourses disponibles pour les étudiants dont la communauté pourrait profiter du programme, et qui montrent une volonté et une détermination de vraiment améliorer les choses. Les bourses couvrent ainsi les frais d’inscription et même les frais de séjour dans certains cas.
Pour chacune des classes enseignées (10 en 2014), l’accent est mis sur la connaissance pratique, et sur les méthodes permettant aux étudiants de retourner dans leur communauté et d’avoir un réel impact. Voici un aperçu des cours enseignés cet été : archivage linguistique, politique linguistique et planification, écriture d’un dictionnaire communautaire, technologies pour la documentation linguistique indigène.
Le cours d’archivage linguistique a montré aux étudiants comment ils peuvent utiliser des bases de données en ligne et des sites web d’archives afin de gérer l’héritage de leur communauté, les objets culturels et la langue à travers des enregistrements de chansons, de poèmes et de conversations. Le cours de politique et de planification linguistiques a encouragé les étudiants à écrire de fausses demandes pour obtenir de vraies subventions, si bien qu’ils ont pu comprendre tout ce qu’implique chaque étape d’une demande d’aide financière pour des projets linguistiques au sein de leur communauté.
Le cours sur l’écriture d’un dictionnaire communautaire a montré comment procéder mais à partir de questions pratiques telles que : combien reste-t-il de locuteurs, comment récolter un maximum de mots en un minimum de temps ou bien quel type de dictionnaire est-il le plus adapté aux besoins de la communauté en question ? Par exemple, une étudiante a raconté que dans sa communauté des Territoires du Nord-Ouest, les aînés Tłı̨chǫ auraient sûrement besoin d’un dictionnaire médical afin de mieux comprendre leurs propres affections et symptômes et donc de mieux les expliquer à leurs médecins. Enfin, le cours sur les technologies a donné aux étudiants un entrainement pratique, sur le terrain, avec du matériel d’enregistrement, et leur a enseigné comment utiliser les technologies pour obtenir les meilleurs résultats possibles à partir de ces enregistrements.
Cependant, la vraie magie du programme réside à l’extérieur des salles de cours. Les 58 étudiants de 2014 représentaient plus d’une douzaine de langues, du saami au gwich’in via le mitchif, si bien que les discussions dans la salle à manger et la camaraderie ont mené à une compréhension plus profonde des deux grandes vérités du programme : 1) les langues indigènes sont sévèrement menacées partout au Canada, en fait partout dans le monde, mais 2) qu’il existe des gens sincères et passionnés prêts à prendre les armes contre cette menace, prêts à documenter et à protéger leurs langues pour les générations à venir.
Il y a souvent une discussion, dans les journaux et les travaux de recherche sur le réveil linguistique, sur la nécessité de combler un fossé entre les universitaires et la communauté affectée en question. Un point d’honneur est mis sur le fait qu’il est essentiel que la communauté linguistique prenne part à ce réveil ou à l’effort de recherche documentaire, et que les membres de la communauté connaissent mieux leurs besoins. Le programme du CILLDI jette un pont d’une manière extraordinaire. Les langues sont incontestablement menacées, mais des programmes comme ceux du CILLDI placent le pouvoir entre les mains des locuteurs de ces langues ; une langue dont les locuteurs sont éduqués dans le domaine de la documentation linguistique et des pratiques de revitalisation – allant de la demande de bourse aux enregistrements de locuteurs via l’archivage – a toutes les meilleures chances de survivre à la perte linguistique au taux alarmant de la perte linguistique dont nous sommes maintenant tous les témoins.
Si vous voulez en savoir plus sir le CILLDI, cliquez sur le lien suivant: http://www.cilldi.ualberta.ca/
A plus, eh!
- Michael Iannozzi et L’équipe du Musée des Langues Canadiennes
La traduction était gracieusement fournie par Floriane Letourneux. Merci bien à elle.
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